Périple au pays des indiennes

ISBN 2-940239-04-5
Texte de : Maurice Evard
Préface de : Pierre Arnold
Nombre de pages : 128
Dimensions : 225 x 285
Image de : Bernard Muller
Date : 2002
Mise en page de : Marlyse Schmid

CHF 90.00

Connaissez-vous les indiennes?

Non, pas celles qui habitent l’Asie ou le Nouveau Monde,
mais les toiles imprimées.

De 1713 à 1874, le Pays de Neuchâtel en a fait une industrie florissante, parallèlement à l’horlogerie et à la dentelle. Une douzaine de villages ont connu une manufacture ou un atelier: Chézard-Saint-Martin, Cortaillod, Colombier, Areuse, Boudry, Couvet, Saint-Blaise, Marin, Cressier, Les Brenets, Le Locle, Valangin.

Périple au pays des indiennes, cochenille, garance et vitriol
évoque tous les aspects techniques, économiques, politiques, sociaux, historiques et géographiques de cette activité qui a intéressé les pays voisins et même plusieurs autres continents.
Les Neuchâtelois ont contribué au rayonnement de l’impression sur étoffes et de nombreux ouvriers sont partis à travers l’Europe pour y exercer leur métier de graveur, de dessinateur ou d’imprimeur.

 

La belle Indienne!

1986 – Bernard Müller découvre «L’arbre de Vie» des Bovet au Château de Valangin. Touché au cœur, il s’émerveille devant la belle indienne. Il faut dire qu’il s’y connaît: avec Marlyse Schmid, sa compagne, n’a-t-il pas développé, en 1981, le concept visuel d’un produit horloger, la «Swatch», donnant à cette montre, outre sa performance technique dont le mérite revient à d’autres, un souffle audacieux et prometteur. Cette montre devait connaître un succès sans précédent.
Emporté par son enthousiasme, Bernard Müller a tenu à réaliser «Périple au pays des indiennes» avec Marlyse, conceptrice de la maquette, et son ami Maurice Evard, historien et ancien conservateur du Musée de Valangin.
Avec précision et compétence, Maurice Evard retrace l’histoire de l’indiennage au cours des XVIIIe et XIXe siècles, avant qu’il ne soit frappé par l’intrusion de la chimie qui a simplifié les processus de fabrication et qu’il ait contourné les secrets de l’art de l’indiennage, sans oublier l’automatisation des machines avec rouleaux imprimeurs pour augmenter la productivité.
Par ailleurs, la concurrence étrangère, grâce à une main-d’œuvre à bon marché, a freiné le développement de notre industrie de l’indiennage avant de l’effacer irrémédiablement.

A la lecture de ce livre, vous découvrirez les professions qui assurent la chaîne du travail qu’il faut accomplir pour obtenir une belle indienne: dessinateurs – graveurs – imprimeurs – tireurs – rentreuses – pinceleuses.
Page après page, on comprend ainsi en quoi consistait la façon minutieuse et ingénieuse de préparer la toile de coton. Le processus de fixation et de préparation des couleurs (drogues), de même que l’importance des mordants utilisés témoignent du génie des créateurs et des artisans.
On apprend par exemple que l’on diluait, dans l’eau du bain où trempait le tissu, de la bouse de vaches nourries exclusivement au foin ou au regain, afin d’obtenir un mordant assurant aux étoffes une meilleure imprégnation des couleurs, avant d’être séchées à l’air, étendues et arrosées sur les prés durant quelques jours.
Cette industrie consommait beaucoup d’eau et de bois de chauffage. Elle exigeait aussi de grands capitaux. Par comparaison, la Fabrique Neuve de Cortaillod avait réclamé un investissement correspondant à quelque trente millions de francs actuels. Elle employait 637 collaborateurs en 1819. Cela démontre l’importance des usines du temps passé.
Vous découvrirez la complexité des règles à respecter, des méthodes à appliquer et des secrets à maîtriser pour obtenir l’«œuvre» finale. Cet ouvrage vous présente également des reproductions choisies, illustrant la beauté des indiennes destinées à la mode vestimentaire, à l’ameublement et à la décoration d’intérieur.
Différents sites de production en Suisse, surtout à Neuchâtel, à Genève et à Bienne, de même qu’à l’étranger, sont présentés, et permettent ainsi d’admirer de belles demeures, témoins d’une industrie qui fut brillante et fructueuse pour notre pays. A sa disparition, nombre de techniciens et créateurs qui avaient fait sa gloire, surent se reconvertir et servirent de base à une nouvelle industrie: l’horlogerie.

Grâce à ce livre, vous pourrez vous plonger dans la vie d’antan, celle des artisans et industriels de notre pays, et en tirer des enseignements pour mieux apprécier le génie et l’endurance de ces innovateurs.

On apprend ainsi que des enfants de dix à douze ans travaillaient comme tireurs ou tireuses, aidant l’homme qui maniait avec adresse les planches sculptées, en bois de tilleul ou de poirier, à appliquer dessins et couleurs successives sur l’étoffe. Une opération exigeant maîtrise et minutie, en frappant sur la planche avec un maillet pour bien répartir la couleur. Fort heureusement la protection de l’enfance a fait de grands progrès et le travail des gosses a été éliminé dans la plupart des pays européens.
On apprend aussi combien il était difficile de transporter des pièces de plusieurs mètres de longueur à travers notre pays, l’Europe et même jusqu’en Amérique. Le commerçant se rendait aux foires allemandes et d’ailleurs pour vendre ses produits, prendre des commandes ou observer les tendances du marché. Il parcourait des centaines de kilomètres, par tous les temps, à cheval, en char ou en cabriolet, en diligence ou à pied, quittant sa famille pour plusieurs semaines voire plusieurs mois.

Certaines manufactures souffraient de la pénurie de travailleurs et devaient avoir recours à la main d’œuvre étrangère qu’elles allaient chercher de l’autre côté du lac de Neuchâtel. Elles donnaient même du travail à des pinceleuses pour finir et retoucher au pinceau les dessins des étoffes. Témoin de cette situation Jean-Jacques Rousseau écrivait en 1764:
«Bientôt, si nous voulons vivre, il nous faudra manger des montres et des toiles peintes, car l’agriculture est absolument abandonnée pour ces arts plus lucratifs».

L’histoire de la belle indienne démontre que l’on peut passer d’une industrie à une autre si le besoin s’en fait sentir et si des hommes ont le courage de faire œuvre de pionniers pour mieux servir. Tout peut alors repartir. Le canton de Neuchâtel, à la croisée des grands axes de passage, est un exemple éloquent de la volonté d’entreprendre et d’innover sans relâche pour relancer l’économie.
A Cortaillod, par exemple, il y a deux siècles, on traitait du fil de coton pour l’étoffe d’indiennes. Il y a peu, le fil de coton a été remplacé par la fibre de verre, fil téléphonique magique, de l’épaisseur d’un cheveu. A deux siècles d’intervalle, le fil est toujours roi!

Une ardente constance doit nous guider: être confiant en soi, avoir le courage et la volonté d’innover pour bâtir une société humaine, à la recherche du bonheur, de la paix sociale au service du pays. Tel est le message de «Périple au pays des indiennes», récit d’une belle aventure où l’art se retrouve à toutes les pages et qui invite le lecteur à mieux connaître son passé pour guider ses espérances.
Par l’élégance de ses traits, de ses couleurs flamboyantes, une belle indienne fait rêver. La recherche du beau et de l’harmonie qu’elle incarne touche les sens et le cœur de l’homme.

Pierre Arnold

22.11.1921 à Ballaigues, prot., de Schlierbach, bourgeois d’honneur de Ballaigues (1984). Fils de Robert et d’Andrée Boisard, épiciers. 1949 Elsbeth Ledermann, fille de Fritz, dentiste. Ecole de viticulture de Carcassonne (F), diplôme d’ingénieur agronome de l’EPF à Zurich (1945). A. occupa des fonctions dirigeantes dans diverses organisations agricoles et viticoles (entre autres, il fut à la tête de la Fédération des sociétés d’agriculture de la Suisse romande). En 1958, il devint directeur de la Fédération des coopératives Migros, puis membre (1959), vice-président (1966) et président (1976-1984) de la délégation de l’administration, enfin président de l’administration (1984-1991). Il fut l’un des instigateurs de la Fondation Pré Vert du Signal de Bougy (comm. Aubonne), créée en 1970, qui permit de laisser le parc accessible au public. Il présida la Fondation Gottlieb et Adele Duttweiler (1991) et l’Union internationale pour le commerce de détail à Bruxelles (1985-1991). Plusieurs mandats dans des conseils d’administration (CFF, Swissair, SMH). Doctorat honoris causa (Lausanne, 1985) et Légion d’honneur (1991)